Marchés : Fitch Ratings dégrade à son tour la note souveraine du Gabon de B- à CCC+
Encore une mauvaise nouvelle pour les autorités gabonaises 11 mois après le « coup de libération » du 30 août dernier. Après Moody’s le mois dernier, voilà que l’agence américaine de notation Fitch Ratings a abaissé le 26 juillet la note de défaut émetteur à long terme en devises étrangères (IDR) du Gabon de ’B-’ à ’CCC+’. Cette dégradation reflète les risques croissants liés à la capacité de remboursement de la dette du pays, exacerbés par des conditions de financement serrées et des dépenses gouvernementales accrues.
La notation ’CCC+’ se situe dans la catégorie des notations à haut risque. Dans l’échelle de notation de Fitch Ratings, les notations commençant par ’CCC’ indiquent que la capacité d’un pays à honorer ses engagements financiers est très vulnérable. En particulier, une notation ’CCC+’ signifie que le Gabon est actuellement en mesure de faire face à ses obligations financières, mais qu’il est extrêmement sensible aux conditions économiques adverses et aux perturbations extérieures.
Principaux facteurs de la dégradation
Risques de liquidité élevés : L’abaissement à ’CCC+’ illustre les risques accrus de remboursement de la dette. Le Gabon fait face à des défis pour mobiliser des financements suffisants en raison de conditions de financement rigides sur le marché obligataire régional et d’une augmentation des dépenses planifiées par le gouvernement de transition. La gestion de ces pressions de liquidité sera difficile dans le contexte de besoins de financement importants, y compris le remboursement de 605 millions USD (2,6% du PIB) de l’Eurobond en 2025. Bien que le Gabon ait toujours priorisé le service de ses Eurobonds, il continue d’accumuler des arriérés extérieurs envers les créanciers officiels, estimés à 165 milliards XAF (1,2% du PIB) à fin mai 2024.
Détérioration des finances publiques : Le solde budgétaire (en base de caisse) est passé d’un excédent de 1,1% du PIB en 2022 à un déficit estimé de 1,8% en 2023. La dette publique pour 2023 est désormais estimée à 70,4% du PIB, contre une estimation précédente de 56,0%, dépassant ainsi le plafond régional de 70%. Cette révision à la hausse reflète l’inclusion des arriérés fournisseurs et autres passifs dans le cadre des efforts du gouvernement pour améliorer la transparence. La qualité des données reste faible, et des dépenses potentiellement sous-déclarées demeurent une préoccupation.
Politique budgétaire expansionniste : Le déficit budgétaire devrait s’élargir à 3,9% du PIB en 2024. Le budget 2024 prévoit des mesures limitées d’augmentation des recettes, à l’exception de l’amélioration continue de l’administration fiscale, y compris la numérisation. Le gouvernement a annoncé plusieurs dépenses pour répondre aux besoins sociaux et infrastructurels du Gabon, notamment l’extension des recrutements dans le secteur public, le règlement des arriérés de pensions et l’ajout de nouvelles exonérations fiscales, sans plan d’ajustement budgétaire concret.
Besoins de financement et options limitées
Les besoins de financement du Gabon sont importants pour 2025 et 2026, en moyenne 13,2% du PIB, y compris le remboursement de l’Eurobond. La flexibilité de financement est limitée en raison du coût élevé de l’émission sur les marchés internationaux et des conditions de financement serrées sur le marché obligataire régional. Le gouvernement ne prévoit aucun soutien budgétaire des créanciers officiels à moyen terme.
Les perspectives de refinancement étant incertaines, Fitch estime que le Gabon pourrait faire face à un déficit de financement en 2025, potentiellement comblé par une réduction des dépôts gouvernementaux, estimés à 2,8% du PIB en janvier 2024. Cependant, ces dépôts n’ont pas empêché l’accumulation passée d’arriérés de dette.
Incertitudes politiques
Les risques politiques, liés au coup d’État militaire d’août 2023, ont diminué avec la formation du gouvernement de transition et la mise en œuvre de l’agenda de transition, ainsi que le plan de tenir des élections en août 2025. Cependant, des tensions sociales pourraient émerger autour des élections en raison des attentes sociales élevées et de la faible capacité institutionnelle du Gabon, entraînant une instabilité politique renouvelée.
La dégradation de la note du Gabon par Fitch Ratings à ’CCC+’ reflète les risques accrus de liquidité, la détérioration des finances publiques et les défis politiques persistants. Pour améliorer sa notation, le Gabon devra démontrer une consolidation budgétaire substantielle, augmenter durablement ses recettes et obtenir un financement international suffisant pour répondre à ses besoins de financement.
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