Au tout début du 20ème siècle, plusieurs missionnaires s’installèrent dans certaines contrées du Gabon pour y établir des bases doctrinales qui consistaient à l’annonce de l’Evangile, à la formation des disciples ainsi qu’au baptême des croyants. En 1900, des spiritains encore appelés missionnaires du Saint-Esprit mettent en place une mission catholique dans un village constitué d’une population d’ethnie Apindji et certainement Tsogho, les deux communautés étant consanguines. La mission aura pour nom « Saint-Martin des Apindji » et participera à l’instruction de plusieurs enfants issus de ces peuples indigènes.
Certains deviendront des membres à part entière du clergé catholique et auront d’ailleurs l’occasion d’approfondir leurs connaissances en allant étudier en Occident principalement en Hexagone. Après l’accession du Gabon à l’indépendance, après qu’il soit longtemps resté une colonie française d’Afrique puis un territoire africain appartenant à l’empire français, le pays manquait profondément de personnel qualifié surtout en matière de gestion administrative voire étatique.
L’illustre disparu
En raison de cela, plusieurs instruits issus des milieux religieux prirent la décision de mettre leurs savoirs au profit de la nation pour tout d’abord participer à la formation des cadres de demain avant de se convertir d’être introduit dans la gestion de la Cité. L’éminent disparu dont nous contons la vie aujourd’hui est considéré comme le pionnier de l’archéologie gabonaise et un des premiers historiens de sa mère patrie. Il fut aussi l’un des premiers intellectuels de son groupe ethnique dont la tradition et les croyances le poussèrent à étudier l’être humain à travers l’ensemble des vestiges matériels ayant subsisté le long des siècles. Il avait pour nom Lazare Digombé (1938-2017).
Venue au monde
C’est en terre « Apindji » qu’est survenue la naissance de Lazare Digombé en date du 15 mars 1938. A cette époque, le Gabon n’était encore qu’une colonie française insérée dans l’administration coloniale du nom d’Afrique équatoriale française (AEF). D’après le très connu prêtre et écrivain anglo-gabonais André Raponda-Walker, le peuple Apindji serait originaire du Haut-Ogooué. Mais ces derniers se seraient installés sur la rive droite de la Ngounié, entre Mouila et la rivière Waka, au commencement du siècle dernier.
Cursus et vie religieuse
Dès son plus jeune âge, Lazare Digombé est envoyé à la mission « Saint-Martin des Apindji » pour y recevoir une instruction française en l’occurrence savoir lire, écrire et s’exprimer aisément. Mais la mission le prédestine à une carrière presbytérale surtout que jamais un religieux n’ait été ordonné au sein de sa communauté. En 1960, Lazare Digombé obtient son baccalauréat au collège Bessieux, lui qui fréquente depuis quelques années le séminaire Saint-Jean de Libreville. Etant très brillant, il bénéficiera d’une bourse française d’études pour poursuivre ses études en Hexagone. Il reviendra de France avec un doctorat en théologie et en histoire.
Cette aide financière estudiantine n’était destinée qu’aux élèves les plus performants. Cependant, Lazare Digombé reçoit son ordination de prêtre en septembre 1966, étant déjà abbé depuis les années 1950. Cette « promotion » religieuse au sein de l’église catholique du Gabon fera de lui, le premier Apindji à devenir curé. Aussi, il deviendra le premier élève issu de la mission catholique « Saint-Martin des Apindji » à embrasser un sacerdoce presbytérien. Durant dix ans, Lazare Digombé exercera son sacerdoce mais finira par mettre fin à sa vie de religieux en 1976 pour se consacrer à la pédagogie en milieu universitaire.
Carrière professionnelle
Quand il arrive à l’université Omar Bongo (UOB) au courant des années 1970, Lazare Digombé prône avec d’autres de la nécessité d’y créer un département d’Histoire. Devenu l’un des premiers enseignants d’histoire et le pionnier du département d’Archéologie, il avait le titre de doyen de la Faculté des Letrres de l’UOB. Lazare Digombé devint plus tard maître de conférences en Histoire et fut honoré de plusieurs distinctions dans le monde l’enseignement.
Ses recherches archéologiques furent d’une qualité et d’une limpidité pour ses poursuivants. Lazare Digombé se plaisait d’autant plus dans l’archéologie car celle-ci est conditionnée par des travaux de terrain alors qu’aux antipodes, l’Histoire elle a pour principales sources des textes ou des gravures. Bien que se servant aussi des documents écrits lorqu’ils sont matériellement disponibles, l’archéologie a l’avantage de faire appel à d’autres sciences de la vie et de la terre à l’instar de l’archéométrie.
Par ailleurs, il est bien vrai que l’Archéologie et l’Histoire ont des similitudes comme aimait le faire remarquer Lazare Digombé. L’une d’elles est le fait que comme l’Histoire, l’Archéologie comprend des divisions chronologiques se scindant en trois grandes périodes à savoir l’Archéologie de la Préhistoire, celle de la Protohistoire et enfin celle des périodes historiques. Quoi qu’il en soit, Lazare Digombé fut un passionné de la recherche scientifique en menant, le temps d’avant son ascension politique, des travaux chaleureusement salués notamment dans ses domaines pédagogiques de prédilection. Lazare Digombé a formé une pléthore de gabonais aujourd’hui cadres et dirigé de nombreuses thèses ainsi que des mémoires.
Carrière politique
Au début des années 1990, Lazare Digombé est promu par Omar Bongo, président de la République gabonaise de l’époque, à la fonction de Secrétaire d’Etat. Enseignant de renom, Lazare Digombé a ensuite été promu au poste de directeur de la direction générale de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. En 1997, il s’en voit confier le portefeuille ministériel. Cependant, Lazare Digombé a aussi été ministre délégué à l’habitat, ministre des sports ainsi que ministre de la culture.
Par ailleurs, Lazare Digombé a été à deux reprises un membre de l’hémicycle représentant le canton Dibadi près de la ville de Mouila pour le compte de la Douya-Onoye, département de la province de la Ngounié.
Trépas
C’est le jeudi 8 octobre 2017 que Lazare Digombé disparaît du monde des vivants alors qu’il était interné dans les locaux du Centre hospitalier universitaire (CHU) d’Akanda, commune de la province de l’Estuaire située au Nord de Libreville. Il laissa derrière lui, une veuve éplorée et de nombreux enfants.
Des hommages ainsi que des oraisons funèbres furent adressés à Lazare Digombé de la part de la communauté universitaire et du gouvernement. Un office religieux pour son âme fut organisé à l’église Saint-Martin de Mouila avant que la dépouille ne soit inhumée à Mikouda le dimanche 28 juin 2017.
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